Cosmologie d'Astorack

La majorité des théoriciens de l’espace s’accorde à dire qu’Astorack se situe au centre de l’univers. Autour d’elle tournent deux astres, dont la nature varie suivant les cultures et auxquels beaucoup attribuent une importance divine. Au-delà se trouvent les frontières du plan matériel, dont la nature reste à ce jour l’un des plus grands mystères de la science. On sait qu’il est possible de les traverser par magie, mais de nombreux doutes subsistent quant à leur perméabilité à la matière physique. En outre, il apparaît impossible de savoir ce qu’il y a de l’autre côté, l’articulation des divers plans entre eux étant méconnue. Enfin, l’ignorance est totale concernant la morphologie même du plan matériel.
Cependant, les moyens dont les scientifiques disposent actuellement, notamment en terme de divination par voie magique, ainsi que l’intérêt porté par la plupart des grands noms de la recherche à la cosmologie ont permis d’atteindre un stade de connaissance très étendu concernant l’organisation de l’univers proche d’Astorack.
Le monde lui-même est constitué de seize « îles flottantes », énormes masses de terre et de roche en équilibre dans l’espace, reliées entre elles par un système de gigantesques ponts de pierre, dont la construction date de temps immémoriaux et est d’ailleurs probablement œuvre divine. Chacune de ces îles abrite un écosystème qui lui est propre. L’impossibilité de trouver une quelconque logique aux divers climats insulaires, que ce soit en fonction de leur position géographique ou de leur configuration topographique, conduit à penser que le régime temporel global de chaque île a été décidé à la création du monde.
De même, les saisons s’enchaînent à des rythmes plus ou moins rapides suivant les endroits, mais ne dépendent jamais d’une quelconque orientation d’Astorack par rapport au corps céleste qui lui procure chaleur et lumière, Illuin. La thèse d’une origine surnaturelle se voit encore confirmée par l’étonnante régularité avec laquelle la nature meurt et se renouvelle, quelle que soit l’île considérée. L’année commune se base d’ailleurs sur ce phénomène puisqu’elle compte trois cent soixante-cinq jours, ce qui correspond à un cycle entier de la nature. Le découpage se fait ensuite de façon beaucoup plus locale, et dépend principalement des coutumes populaires et du rythme des saisons. Le jour est une unité de base universelle, puisqu’il s’agit de l’intervalle de temps entre deux levées d’Illuin.
Autour d’Astorack, on trouve une énorme boule de gaz respirable qui constitue l’atmosphère. Son contenu exact varie suivant les lieux, mais on observe partout une importante teneur en oxygène et en azote, présents en quantité quasi constante. Le phénomène qui empêche la fuite de ces gaz vers l’espace est encore méconnu, mais de récentes percées suggèrent deux pistes d’étude : d’une part, une force d’attraction qui s’appliquerait à toute matière dans un certain rayon autour d’Astorack et qui la retiendrait à proximité, et d’autre part, une couverture gazeuse beaucoup plus dense qui formerait une sphère de protection autour du monde. L’existence de cette sphère est d’ailleurs démontrée, de même que sa nature, puisqu’on sait qu’elle est constituée d’ozone. C’est son rôle qui est sujet à débat.
La science commence à montrer ses limites lorsqu’on tente de comprendre ce qu’il se passe plus loin d’Astorack. L’espace extra-atmosphérique est vide, c’est une quasi-certitude. Mais au-delà, l’étude des deux corps célestes que tout un chacun peut observer par un temps sans nuages n’en est qu’à ses premiers balbutiements, comme en témoigne la révérence divine que leurs vouent encore de nombreux peuples, même parmi les plus avancés. Une question parmi tant d’autres : d’où vient l’énergie, à première vue inépuisable, qui alimente ces astres ?
Le cycle des jours et des nuits sur Astorack suit un rythme de vingt-quatre heures très précisément. Il est dû à la rotation périodique des deux corps célestes connus autour du monde : Illuin, l’astre du jour, se lève à l’est et éclaire quatorze heures durant les êtres de sa lumière blanche et chaleureuse ; Elemir, le joyau de la nuit, apparaît le soir à l’ouest peu après la disparition d’Illuin, et brille de sa pâle clarté dix heures durant, avant de céder à nouveau la place au jour.
Le règne d’Elemir est aussi marqué par l’apparition dans le ciel d’innombrables lueurs, comme autant d’astres minuscules. L’origine de ce phénomène reste à ce jour inexpliquée, même si certains pensent qu’il s’agit de manifestations ponctuelles du plan astral dans le ciel d’Astorack. D’autres, beaucoup plus audacieux, voient dans ces étoiles, comme les nomment les astrologues, la preuve de l’existence d’autres mondes dans le plan matériel, et d’intrépides ingénieurs gnomes ont même envisagé un instant de construire un moyen de transport interstellaire, avant d’abandonner devant l’ampleur colossale du projet et par manque de techniques de propulsion efficaces. En tous les cas, les sages savent que les étoiles constituent une manière rapide de se repérer, et tout aventurier un tant soit peu expérimenté vous dira qu’il est beaucoup plus facile de se perdre de jour que de nuit.
Il est impossible de parler cosmologie sans évoquer les travaux du Cercle d’Eldaminas, qui rassemble sur Teldagorost les plus grands spécialistes de la discipline. Les plus fameux d’entre eux, parmi lesquels on peut citer l’illusionniste Herugil Tête d’Acier ou le mage Aramil, ont élaboré de stupéfiantes théories à partir des nombreuses observations qu’ils ont menées grâce au magnifique télescope, de conception gnome et de fabrication elfique, qui trône au sommet de leur tour.
Les plus iconoclastes de ces séduisantes réflexions impliquent une totale remise en cause de la pensée actuelle en la matière : certaines évoquent par exemple l’existence d’un troisième astre, diurne, invisible car dissimulé par la clarté d’Illuin ; d’autres refusent de croire en la brillance naturelle d’Elemir et voient dans sa lueur blafarde un simple reflet de la seule véritable source de lumière, Illuin ; les plus folles renversent totalement la mécanique des astres en affirmant que c’est Astorack qui tourne autour d’Illuin, et non l’inverse !
Malgré leur évidente absurdité, ces hypothèses ne manquent pas d’alimenter d’interminables débats au sein de la communauté scientifique mondiale.